A propos Gérard Cornu

Je suis ce monsieur qui parle sur la photo, et qui en a fait un métier bien improbable, de parler, alors que rien, mais vraiment rien, ne l’y prédisposait. Je le fais le mieux possible, ce métier, simplement car je ne supporterais pas d’être un mauvais prof. Je me suis posé à Nantes il y a 27 ans, juste au moment où cette « belle endormie » se réveillait. J’ai quelques passions : la musique, les langues, l’herméneutique. Outre les techniques et l’histoire du journalisme, j’enseigne l’analyse filmique (cinéma espagnol et latinoaméricain), et j’ai en charge la communication de la Faculté des langues. J’aime écrire plus que parler, et j’aime aussi « faire écrire ». C’est en grande partie l’objet de ce blog. Amener des étudiants pas vraiment littéraires à pratiquer ce genre simple et populaire qu’est le reportage, à mettre en mots des rencontres, à s’imposer un fil conducteur, et à donner le meilleur d’eux-mêmes.

Parasitisme

Je vais faire vite, car je manque de temps ce soir, mais je reprendrai cet article plus tranquillement dans deux ou trois jours. Aujourd’hui, je suis furieux, tout simplement. Furieux de constater à nouveau l’arrogance des journalistes face aux hommes politiques. L’excuse est facile de prétendre jouer un rôle destiné à « casser » la langue de bois des  politiques, et de s’octroyer dès lors le droit de les malmener, souvent grossièrement, lorsqu’ils acceptent une invitation sur un plateau de télévision.

Aujourd’hui donc, c’est Yannick Jadot, d’Europe Écologie Les Verts, qui vient sur le plateau de France 2 annoncer le retrait de sa candidature à la Présidentielle au profit de Benoît Hamon. Julian Bugier lui demande d’emblée quelle décision il a prise cet après-midi après leur rencontre. Y. Jadot aurait peut-être mieux fait de répondre d’emblée « oui, je retire ma candidature » et d’argumenter ensuite. Mais il commence par expliquer les raisons de son retrait. Il le fait de façon concise en quelques phrases qui vont à l’essentiel. Au bout de 45 secondes environ, J. Bugier piaffe déjà : « Votre décision !? » Continuer la lecture

Enseigner des savoir-faire et pas seulement des savoirs

On s’interroge à juste titre sur la capacité de l’université à transmettre non seulement des savoirs, mais aussi des savoir-faire. Or, ce dont un jeune diplômé aura besoin en occupant un premier poste comme salarié ou comme stagiaire, c’est bien d’une capacité à observer, analyser, décider, agir et interagir d’une façon adaptée face à la spécificité de chaque situation rencontrée.

Voici un tout petit exemple de « recadrage » dans le contexte d’un suivi de reportage. J’ai eu envie de le raconter, car il offre un assez bon aperçu de ce qu’est une pédagogie orientée vers les savoir-faire. Continuer la lecture

Élaborer un angle

Nous revoici dans la période de l’année où germent les idées de reportages, encore un peu floues parfois. En ce moment, je demande systématiquement à mes étudiants de prendre deux ou trois semaines pour mener une première approche de leurs sujets et réfléchir sur le choix de leur angle avant d’engager l’enquête de terrain proprement dite.

En voici deux exemples : les cafés polyglottes à Nantes, et un club de karaté à La Roche sur Yon. Continuer la lecture

Le futur à reculons (ou l’avenir muséifié)

Zhenlong Shi, Maeva Joly, Elena Yuhtina, « Fermeture du musée de la communication à Saint-Barthélémy d’Anjou : la fin d’un symbole ?« , juin 2016, (Le musée)

Le musée de la communication de St-Barthélémy, près d’Angers, a fermé ses portes le 31 décembre 2015. Pas facile de parler de quelque chose qui n’existe plus, ni de parler d’un échec, dans un reportage dont le but n’est pas seulement d’intéresser, mais de passionner ses lecteurs. Alors, lisez, et vous verrez que vous ne lâcherez pas cette lecture avant la dernière page !

La principale source d’informations est – enfin, était… – le directeur de ce musée, passionné depuis l’enfance par les objets du futur, et qui vit durement son échec à faire vivre le musée dont il a pris la direction en 2013 après avoir été pendant 10 ans l’assistant de son fondateur. Ce musée est pour lui désormais un regret, une nostalgie. Continuer la lecture

« Les visages sont tendus, les yeux, concentrés, et le stress, palpable. »

Rémi Laridan, Antoine Morice, « Le PoweR’ Angers« , (rep foot angers)

 

Lisez le premier paragraphe : une « attaque » modèle. Et la suite n’est pas mal non plus du tout… C’est concret, informatif, on découvre et on s’intéresse.

Regardez par exemple le plan des paragraphes de la première page : 1 – concret, les jeunes joueurs ; 2 – plus large, le « Monsieur Recrutement » du club ; 3 – général, la procédure du recrutement ; 4 – retour à concret, les jeunes joueurs. C’est impeccable !

le théâtre amateur : imparfait ou plus-que-parfait ?

Nina Ouaïss, Lisa Langlois, « Acte« , juin 2016, (Reportage ACTE ,NinaOuaïss,Lisa LangloisFINALC)

Vous avez vu cette mise en page ?! Et imaginez la présentation papier, au format A3 sur papier photo !

Comme ça n’apparaît pas dans le titre, je vous le dis : ce reportage traite du théâtre en langues étrangères à la fac, et plus spécifiquement le théâtre en anglais.

L’angle ? Comment arrive-t-on à un tel niveau de « professionnalisme » avec des amateurs, un budget réduit, un temps limité ? Hypothèse : en faisant de son amateurisme une force, peut-être ? Une incitation à innover encore plus ? Un goût frais et joyeux ? Pour ceux qui n’avaient pas compris ce que c’est qu’un angle, en voici un bel exemple !

Nina était dedans, et Lisa était dehors. Cela fait un bel ensemble.

« MY GENERATION »

Mehdi Khotcha, Léa Vince, « La clef de la vulgarisation », juin 2016, https://youtu.be/TGZS4IV7wiE

 

« Things they do look awful c-c-cold.

I hope I’ll die before I get old. »

 

1969, Pete Townsend fracassait sa guitare contre les amplis. Roger Daltrey, veste de cow-boy à franges et sans manches, cheveux bouclés tombant sur ses épaules, électrisait la foule. Deux enfants de la working class anglaise. Violents, révoltés, autant contre leurs pères prolo que contre les bourgeois. Ça ne rigolait pas : « j’espère que je mourrai avant de devenir vieux ! » Vous entendez ?? La chanson s’appelait « My Generation ».

C’est vrai que Roger Daltrey a aujourd’hui 72 ans et qu’il porte un sonotone, car il est devenu sourd il y a deux ans. A cause de tous les décibels reçus pendant ses jeunes années. Je ne me moque pas. J’y ai cru et j’y crois encore… Je suis de cette génération-là. Continuer la lecture

« Je vivais comme un animal. »

Yasmine Chouchane, Linda Arsalieva, « Résilience« , juin 2016 (résilience)

En cette période de corrections, je découvre des « œuvres » qui vont au-delà de tout ce que j’aurais pu imaginer. Après Souhad et Hasna, voici Linda et Yasmine. Elles ont interviewé deux réfugiés, une Tchétchène et un Libyen, qui ont tous deux connu l’emprisonnement et la torture.

Elles ont regardé en face ceux qui ont vécu des souffrances telles que nous en sommes saisis d’effroi et presque tentés de les fuir. Ce sont des étudiantes comme vous. Leurs yeux n’ont pas cillé. Continuer la lecture